Page 12 - La gare
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Le Tortillard


      Monsieur Pierre Barreaud, boucher du village, (1904-2006) et grand-père de Sylvain Barreaud, maire en 2019, année de la rénovation du
      Square de la Gare, évoquait, dans le bulletin municipal n° 24 d’avril 1990, l’époque où le train circulait à Port d’Envaux.

            Monsieur Pierre Barreaud nous a permis de faire revivre le petit train que bien peu de gens ont connu, mais qui a laissé ses empreintes un peu partout
      dans notre commune et dans celle de Crazannes.

            « Ce petit train que tout le monde nommait le « tramway », reliait Taillebourg à St Porchaire et, bien longtemps après sa suppression, on voyait encore
      aux intersections le panneau « Attention au tram ». C’était un vrai train miniature avec sa locomotive à vapeur et ses wagons qui possédaient une plate-forme
      à chaque extrémité. Il était prolongé par un wagon pour marchandises.
            On l’entendait et on le sentait venir de loin. Son coup de sifflet servait surtout, à l’époque, à chasser les vaches et autres animaux qui se
      promenaient sur les voies, minuscules elles aussi. Mais il prévenait aussi les voyageurs qui ne prenaient pas toujours la peine de se rendre dans une de ses
      gares. Il roulait si lentement qu’il était aisé de le prendre en marche. Quant à l’odeur de sa fumée, si certains la trouvaient un peu polluante, c’est qu’ils ne
      savaient pas ce que l’avenir leur réservait dans ce domaine.
            Après avoir quitté la gare de Taillebourg, située devant la gare SNCF actuelle, la voie traversait la Charente en passant sur l’ancien pont, puis
      gagnait Saint James en empruntant la « Chaussée romaine ». Là, se situait une petite gare, en face de la maison Pacaud.
            La gare de Port d’Envaux avait une importance particulière du fait de l’existence de la maison James et Pierre Ferret grâce à laquelle il existait de gros
      transports de bois. Un chef de gare, qui se nommait Mme Gachet, habitait une petite maison derrière celle de Mr et Mme Gendre. Ensuite, la voie se dirigeait
      vers le Château de Crazannes. Là se trouvait la gare, sur l’emplacement de l’actuelle maison de Mr et Mme Suire.
      Enfin cette voie se perdait vers La Renardière, Plassay, puis traversait la route nationale et gagnait Saint Porchaire et enfin Marennes.
            Malgré un trafic intense, personne ne parle d’accident, si ce n’est la fois où un wagon seulement tomba dans le « ravin » situé à l’emplacement du
      garage de Mr Brossard.
            Le tram transportait beaucoup de voyageurs. Mais ce qui a le plus marqué dans le souvenir de nos grands-parents, c’est l’arrivée de nombreux
      réfugiés venant de la Meuse, pendant la guerre 14/18. Certains se sont fixés dans notre village, dont Mesdemoiselles Serva et Mme Pinaud. Il y avait
      aussi une sage-femme, Mme François, qui exerça son métier dans la commune. Beaucoup de port d’envallois sont venus au monde par ses soins, car la
      plupart des médecins de la région étaient sur le front. Cette dame habitait aux Rivauds, dans la maison actuelle de Monsieur Caillot.
            Le train acheminait également de nombreux colis vers Paris, via la gare SNCF de Taillebourg. Pendant l’hiver, la boucherie Barreaud en envoyait
      environ 25 par semaine. Parmi leurs clients parisiens, figurait Mme Rocard, grand-mère de notre premier ministre.
            Rien n’aurait pu empêcher notre « tortillard » de passer chaque jour, sauf la crue de 1904. En février, il fallut arrêter le trafic, l’eau de la crue de la
      Charente ayant endommagé la voie sur les 24 arcades qui reliaient Saint James à Taillebourg.
            Cependant, un matin de 1925, on n’entendit plus son sifflet, les ménagères purent étendre leur linge sans crainte de le voir sali par sa fumée.
      Le petit tram était mort, les autorités en avaient décidé ainsi.
            Certains, dans leur rêves, s’écartent encore pour le laisser passer en agitant leur coiffure et en criant : Salut POLYTE »*

                                                                                                                                   Jacqueline et Jean Gaud

      *POLYTE : ainsi surnommait-on le petit train diminutif d’Hippolyte
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